Les cadres ont-ils le moral en cette fin d'année 2020 ?
C’est un indicateur pertinent : quand les cadres ont le moral, c’est souvent le signe que l’économie va bien. La crise fait des dégâts mais les cadres ont bon espoir de les surmonter.
Comme souvent, les cadres restent confiants. Mais cette année, ils sont aussi prudents. « Bien qu’à l’écoute du marché, ils sont aujourd’hui nombreux à appuyer sur « pause » et à revoir leurs critères de choix pour changer de poste », indique une étude de l’IFOP réalisée en septembre 2020.
Toujours optimistes
Alors que l’Apec prévoyait 300 000 recrutements de cadres en 2020, l’association pour l’emploi des cadres a revu sa copie. « Il devrait y avoir 100 000 à 200 000 recrutements seulement », affirmait sur BFM Gilles Gateau, le directeur général de l’Apec. En cause : le contexte économique et le manque de visibilité des entreprises.
Malgré ce climat incertain, les cadres affichent un niveau d’optimisme au plus haut. Trois quarts d’entre eux sont confiants. « Ce score paradoxalement élevé trouve sa source dans la confiance qu’ils ont envers leur entreprise à surmonter la crise », indique l’IFOP. Une confiance qui s’explique notamment par les prêts garantis par l’Etat (PGE), selon Pascal Leclère, le dirigeant de Potentiel, cabinet de recrutement par approche directe.
« Les PGE ont été une aubaine pour les entreprises qui y ont souscrit soit par précaution pour l’avenir, soit pour se restructurer en interne ». Une aubaine qui a permis de consolider la trésorerie des entreprises qui allaient déjà bien ou d’aider à surmonter la période pour d’autres. « C’est ce qui peut expliquer cette confiance pour la suite », ajoute Pascal Leclère.
Prudents et moins mobiles
Si les cadres conservent leur optimisme, le contexte économique a cependant impacté leur mobilité. D’une part, l’Apec a constaté une chute de 30% des offres d’emploi cadre au premier semestre, réduisant les opportunités de mobilité externe des cadres. D’autre part, l’IFOP annonce qu’un cadre sur deux ne souhaite pas quitter son entreprise pour le moment. Un niveau de prudence record : ils n’étaient que 35% en 2019.
Une prudence qui se traduit également dans les intentions des cadres pour leur avenir professionnel. L’envie de devenir indépendant décline passant de 5% en 2019 à 1% en 2020, celle de créer son entreprise de 7% à 3% ou celle de changer d’activité de 8% à 2% … Signe qu’ils privilégient le salariat traditionnel.
Du côté des salaires
Bien lotis ces dernières années, les cadres ont vu leur salaire augmenter pour la troisième année consécutive : +2,3% cette année, après +2,4% en 2019. « Le salaire médian se stabilise à 50 000 € », indique Gilles Gateau, qui prévient : « La crise économique aura aussi certainement un impact sur les rémunérations. » A la vue des opportunités de mobilité qui diminuent, le directeur généra de l’Apec est inquiet pour les cadres jeunes, de moins de 30 ans. « Ils sont les plus mobiles et pourraient être moins nombreux à bénéficier d’une évolution salariale dans le cadre d’une mobilité externe. » A suivre, donc si les évolutions de salaire impacteront le moral des cadres en 2021.
Le télétravail ? Oui, mais pas trop !
Alors que les discours pour plus de vert, de nature et de télétravail ont inondé les discussions depuis le confinement, les cadres ont-ils vraiment envie de suivre ces changements ?
Nouvelle organisation du travail
Une récente étude montre que les cadres français seraient plus réticents au travail à distance que leurs voisins européens : seulement 16% veulent continuer de télétravailler tous les jours de la semaine.
Néanmoins ils ne sont pas totalement fermés : 58% d’entre eux souhaitent garder un rythme de télétravail à raison d’un jour par semaine. Jean-Claude Delgenès, expert en organisation du travail, s’exprimait sur le sujet sur BFM Business mi-septembre : »je suis étonné par les entreprises qui lancent de grands plans de télétravail. On le sait : avec plus de deux jours par semaine en dehors de l’entreprise, il y a un phénomène négatif sur la créativité collective des salariés. »
Une vision que ne partage pas Pascal Leclère, selon qui le travail à distance va permettre, dans certains cas, de garder les meilleurs candidats en leur offrant la possibilité de se sentir mieux dans leur organisation de vie, avec moins de transport par exemple. Ce constat est d’autant plus important que les entreprises intègrent aujourd’hui au sein de leurs équipes les générations Y et Z, qui sont plus interconnectées et mobiles.
Envie de changement
En revanche, la période de télétravail engendrée par le confinement a révélé d’autres indicateurs intéressants concernant les envies des cadres. Si les Français veulent en majorité revenir travailler au bureau, ce n’est pas sans attendre des changements. 46% des cadres français estiment que le premier élément sur lequel les entreprises vont devoir évoluer après la crise est l’autonomie et la confiance accordée par le management, mais aussi l’habilité et la rapidité dans la prise de décision (42%). « Il y a des critiques vis-à-vis du télétravail, certes, mais la période est riche d’enseignements », observe Pascal Leclère. » Adaptons nos organisations, soyons agiles, afin de comprendre les enjeux, les aspirations des collaborateurs pour continuer à se développer et grandir. »